A PROPOS

Je suis de gauche depuis l'enfance.Je suis membre de la CFDT depuis 2008.


mercredi, mars 21, 2012

Casher et halal: du caractère déraisonnable des réactions

Tout a commencé,il y a près de deux ans (en réalité, tout a commencé dès les origines, du moment où les différences se sont cotoyées), en France, quand l'UMP a lancé le débat sur l'identité nationale et que des députés UMP issus du courant "La Droite populaire" ont parlé du "tabou sur la viande de porc", en même temps que les groupes Identitaires d'extrême droite.
Sont apparus face à l'annonce d'un Quick halal dans le nord de la France et des articles sur les épiciers ne vendant plus de jambon, les "apéritifs saucisson et pinard". Il est vrai que bon nombre de Français prennent ce qu'on appelle, en France, de la cochonnaille (des gratons à Lyon, des morceaux de quiche lorraine,...) avec un verre d'alcool; chaque région possède sa spécialité de charcuterie et nous sommes le pays du dicton "Tout est bon dans le cochon".
Dont acte. Toutefois, même s'il l'on sait que les sociétés peuvent évoluer aussi lentement qu'elles peuvent se transformer, la France est un pays d'immigration depuis les années 1850 et un pays d'immigration de personnes en provenance de pays de tradition musulmane depuis les années 20...il serait temps de s'en rendre compte et d'apprendre à connaître comment l'autre est constitué dans son éducation.

Une première notion qui est inscrite dans nos sociétés, depuis longtemps, même si elle a pu rebuter à certaines époques, à savoir la notion d'altérité. Cela va même plus loin qu'on le pense: nos régions françaises ont pu être en souveraineté étrangère, l'Alsace était terre d'Empire, la Bretagne était un duché souverain de culture celtique, les terres occitanes se sont méfiées du pouvoir royal du nord...
Le premier vrai choc de l'altérité a été celui des catholiques face aux protestants, à partir de 1517, le royaume de France a vu passer le nombre de réformés de 0% à près de 15 à 20%,en près de vingt ans, selon les historiens.

Arrive la deuxième notion, celle de la concorde et paix civile couplée à celle de tolérance. Entre temps, l'extension de la Réforme en France a causé les Guerres de Religion où les protestants étaient perçus comme l'ennemi n°1 car ils remettaient en cause l'unité religieuse du royaume. Mais pouvait-on aller jusqu'à l'extermination des communautés protestantes pour respecter cet "impératif" d'unité religieuse autour du "Roi Très Chrétien" (sacré à Reims, protecteur de l'Eglise catholique et portant à son doigt l'anneau d'améthyste d'un évêque.)?
Non et le roi Henri IV a mis fin à cette folie,avec l'Edit de Nantes en 1598. Le "bon roi Henri" a lors fait du relativisme, une idéologie royale et étatique; celle qui veut que chacun mène sa vie de manière privée, avec la foi qu'il désire et les rites qu'il souhaite. Une esquisse première de la notion de laïcité.

L'on se demandera, pourquoi une explication remontant si loin. Tout simplement, parce que ce momentum a formé à jamais la notion de laïcité à la française et ces contours de cette dernière. Ces tensions autour du halal et du casher ont repris récemment, en France, suite à l'affirmation de Marine Le Pen, candidate du Front National à la présidentielle sur le fait que toute la viande d'Ile de France était halal. Après les enquêtes des journalistes, on s'est rendu compte qu'une petite partie de la viande des abattoirs franciliens était effectivement halal et non indiquée comme telle. C'est là que ce débat a été repris au Québec.

Soyons clairs et francs. Nos sociétés laïques veulent que l'on indique le type d'abattage s'il est rituel ou non, afin que chacun décide de consommer ou pas telle viande. De même qu'il n'est pas envisageable que des groupes religieux fassent pression pour obtenir dans les écoles publiques et/ou non confessionnelles (écoles privées non-confessionnelles), des plats de viande casher ou halal. Le pragmatisme fait que depuis des années, on propose un plat de poisson ou un plat sans viande. Et cela doit s'arrêter là.

Tout est relatif, selon les habitus culturels: au Cambodge, il arrive de consommer des blattes ou des tarentules frites. Jamais, pour une très grande majorité de Français ou de Québécois, il ne viendrait à l'idée de faire la même chose! Pourtant, il parait que c'est une friandise recherchée. Comme quoi, tout est relatif!

Quand j'entends le premier-ministre français François Fillon demander aux communautés juives et musulmanes de "revenir sur des pratiques ancestrales" ou le député, André Simard du Parti Québécois estimer que "ce ne sont pas les valeurs du Québec", j'affirme purement et simplement que cela ne les regarde pas et qu'ils ajoutent à la polémique.
Ce n'est pas leur rôle et leur fonction impose que l'on ne se serve pas d'argument opportuniste et populiste, surfant sur les peurs et préjugés des gens.
Ceci est d'autant plus étonnant de la part de François Fillon qui a souvent critiqué l'aspect de rigidité nationale du président Sarkozy; le député péquiste, lui, est issu du principal parti de la gauche québécoise. Ceci ne ressemble pas au PQ et le halal ou le casher n'est en rien un "accommodement déraisonnable", c'est rite religieux, rien de plus.
Ceci est clairement électoraliste, disons-le sans fard, nous sommes en France en pleine élection présidentielle et d'ici un an en élection nationale pour le Québec.

Rappelons que la laïcité qui vise à la neutralité de l'Etat, le respect des croyances et de l'athéïsme, ne vise en rien l'intervention dans les pratiques rituelles ou vestimentaires des religions, sauf bien entendu à l'école ou dans la fonction publique. En effet, le rapporteur de la Loi de Séparation de l'Eglise et de l'Etat en 1905, Aristide Briand, a répondu, à l'époque, au député Chabert que la soutane insupportait:

" Au risque d’étonner l’honorable M. Chabert, je lui dirai que le silence du projet de loi au sujet du costume ecclésiastique qui paraît le préoccuper si fort, n’a pas été le résultat d’une omission mais bien d’une délibération mûrement réfléchie. Il a paru à la commission que ce serait encourir, pour un résultat plus que problématique, le reproche d’intolérance et même s’exposer à un danger plus grave encore, le ridicule que de vouloir, par une loi qui se donne pour but d’instaurer dans ce pays un régime de liberté au point de vue confessionnel, imposer aux ministres des cultes de modifier la coupe de leurs vêtements."


Les autres religions ou obédiences religieuses, autres que catholiques et réformées/luthériennes demeurent mal connues, il serait de bon ton de davantage apprendre à les connaître, dans leur DIVERSITE, afin de ne pas ignorer le voisin que nous cotoyons tous les jours. Je souligne ce point particulier car tout est interprétable en matière religieuse, quoiqu'en disent les ultras-conservateurs et donc il existe différents niveaux de religiosité: des gens qui vont à l'essentiel, tout comme des gens qui tiennent scrupuleusement au moindre détail. C'est aux croyants d'arriver à l'aggiornamento des croyances, rites, coutumes et pratiques. Tout arrive à point nommé.

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